Santé et climat : on peut gagner sur les deux tableaux
L’arrivée des beaux jours, couplée au retour de nombreuses activités sociales et sportives en particulier de plein air, a un effet bénéfique sur notre moral mais aussi notre santé et il y a tout lieu de s’en réjouir et d’en profiter! Mais les périodes de chaleur comportent aussi quelques risques pour la santé, ce d’autant plus que leur fréquence et leur intensité ont augmenté de 200% depuis 1901. De son côté, la température moyenne en Suisse a augmenté de 2°C depuis le début des mesures en 1864.
La santé est affectée de manière directe à travers les canicules et autres événements météorologiques extrêmes. Les changements climatiques peuvent aussi porter atteinte à la santé de manière indirecte, en affectant la qualité de l’air et de l’eau, en facilitant la propagation de maladies encore absentes chez nous ou en causant des accidents.
D’une part, la hausse des températures est responsable de nombreuses maladies, par exemple cardiovasculaires et pulmonaires, ainsi que d’hospitalisations. Elle tue aussi déjà, même dans notre pays, ce qui a largement été mis en évidence par plusieurs études suisses à partir 2003. Récemment, des chercheurs de l’Université de Berne et de la London School of Hygiene and Tropical Medicine ont fait le lien avec le changement climatique dans une étude publiée le 31 mai dernier dans la revue Nature Climate Change. Ils estiment qu’à l’échelle mondiale, ce dernier est responsable de plus d’un tiers des décès liés à la chaleur, avec des variations par régions (31,3% pour la Suisse). Les plans de lutte contre les effets de la canicule, tel que celui développé par le canton de Vaud dès 2009, permettent de sauver des vies.
D’autre part, le réchauffement permet l’installation en Suisse d’espèces qui présentent un risque potentiel de transmission de maladies, comme les tiques et le moustique tigre. Ce dernier, par exemple, pourrait transmettre plusieurs maladies encore absentes de nos régions, dont le chikungunya et la dengue. Cela peut paraître abstrait, lointain, exotique. Mais en fait, la dengue pourrait devenir, sous l’effet du réchauffement et avec l’arrivée du moustique tigre, une maladie endémique dans les pays européens.
Pour préserver notre santé, nous devons donc tout d’abord prendre des mesures de prévention des risques. Une partie des effets du réchauffement ne se laissera plus éviter et nous devons être parés. C’est pourquoi le canton maintient et renforce ses programmes de prévention en portant une attention particulière aux personnes les plus vulnérables, comme les jeunes enfants et les personnes âgées, ainsi que celles qui souffrent de maladies chroniques. Vous lirez notamment dans ces pages comment se prémunir des effets de la canicule et comment empêcher le moustique tigre de s’installer chez nous.
Si ces mesures d’adaptation sont nécessaires, elles ne sont toutefois pas suffisantes. Il faut aussi agir directement sur la réduction des causes du réchauffement climatique, à savoir les gaz à effet de serre (GES). Tous les départements sont concernés par la lutte contre le réchauffement. Dans le domaine sanitaire, nous évaluons le potentiel de diminution de la production de GES du système de santé, c’est-à-dire dans les hôpitaux, les institutions ainsi que dans les soins à domicile. Nous soutenons aussi un projet mené par Unisanté concernant les cabinets médicaux, avec pour double objectif de lister les bonnes pratiques leur permettant de diminuer leurs émissions et d’informer les patients sur les liens entre santé et climat. Nous poursuivons également les actions de promotion de la santé favorables au climat, comme la promotion de l’activité physique.
Agir pour le climat, ce n’est donc pas seulement agir pour un objectif qui peut parfois paraître lointain et abstrait. C’est aussi agir directement pour améliorer la santé de la population, ici et maintenant.
Car, et c’est important de le dire, il est possible de mettre en place un cercle vertueux. En effet, les liens entre santé et climat peuvent aussi être positifs car il est vrai que ce qui est bon pour la santé l’est aussi pour le climat et vice-versa. Concrètement, en prenant des mesures pour promouvoir par exemple une mobilité active, comme le vélo, ou une alimentation locale, on améliore la santé de la population tout en atténuant le réchauffement climatique. Et en retour, l’atténuation du réchauffement climatique permet de diminuer les risques pour la santé engendrés par ce réchauffement, comme par exemple la propagation de maladies tropicales.
Agir pour le climat, ce n’est donc pas seulement agir pour un objectif qui peut parfois paraître lointain et abstrait. C’est aussi agir directement pour améliorer la santé de la population, ici et maintenant.
Rebecca Ruiz,
Cheffe du Département de la santé et de l’action sociale