Pénurie de médecins de premier recours: comment lutter?
Les statistiques permettent d’établir qu’à l’horizon 2020 la pénurie en médecins sera importante. Ce déficit s’annonce particulièrement marqué pour la médecine de premier recours (médecins généralistes, internistes et pédiatres) fortement sollicitée du fait du vieillissement de la population et de l’augmentation de la prévalence des maladies chroniques.
Les régions périphériques sont les plus touchées
Les risques de pénurie ont un impact particulièrement fort dans les régions périphériques car elles connaissent une conjonction de phénomènes: les médecins de premier recours (MPR) y sont déjà actuellement peu nombreux et âgés, et ils assument une lourde charge de travail dont une astreinte à la garde plus conséquente que s’ils exerçaient en ville.
Une étude réalisée en 2010 par l’Institut universitaire de médecine sociale et préventive a fait ressortir que sur les 2052 médecins actifs, 690 soit 34% exercent en tant que MPR. Parmi ceux-ci, 20% cesseront leur activité d’ici 2015 et 40% d’ici 2020. Une autre étude menée la même année par l’Observatoire de la santé a révélé que certaines zones géographiques (Chablais, Pays-d’Enhaut, Moudon, Broye, Vallée de Joux, Pied-du-Jura) sont particulièrement menacées de pénurie médicale et que cette menace pèse davantage sur la relève de MPR.
En parallèle, on remarque chez les jeunes médecins un changement de mode de vie passant par une valorisation de la qualité de vie et une recherche d’équilibre entre vies professionnelle et privée. La féminisation marquée de la profession médicale engendre également une augmentation de pratique à temps partiel, notamment lors de la venue d’un enfant. Aussi, on observe chez les jeunes médecins une perte d’attrait de la médecine générale particulièrement dans sa forme traditionnelle du cabinet individuel et l’isolement qui caractérise la pratique médicale dans les régions décentralisées constitue un facteur dissuasif. La nouvelle génération préfère exercer en cabinet de groupe, plus propice à une activité à temps partiel.
Ces régions sont donc doublement pénalisées: mal dotées aujourd’hui, elles n’attirent pas les jeunes médecins de demain.
Un modèle à changer
Au vu de ces éléments, le maintien d’une médecine selon le modèle traditionnel avec le médecin travaillant seul en cabinet est donc fortement remis en cause.
L’Etat, plus particulièrement le Département de la santé et de l’action Sociale (DSAS) est préoccupé par cette situation. Dans le but de mieux connaître les besoins et préoccupations de certaines régions, le DSAS souhaite établir une meilleure collaboration avec les communes, car elles peuvent exercer un rôle important dans la lutte contre la pénurie de médecins. Les communes peuvent prendre des initiatives pour anticiper les situations de pénurie afin de continuer de garantir un accès aux soins médicaux à leur population.
Des moyens à utiliser
Divers moyens peuvent être utilisés pour attirer les jeunes médecins à s’installer dans des zones extra urbaines et les communes ont la latitude pour élaborer des formes d’incitatifs ou de soutien:
- mises à disposition de locaux pour faciliter la mise en place de cabinets de groupes,
- propositions de bail locatif à tarif préférentiel,
- garanties accordées par les collectivités publiques,
- facilitation des autorisations de construire, etc.
Pour contrecarrer cette pénurie, l’Etat a déployé divers moyens d’actions. Dans ce cadre, il a entre autre instauré à la fin 2009 une Plateforme cantonale pour la MPR. Ce groupe d’experts composé de médecins se veut être un lieu d’échanges sur les thèmes relatifs à la médecine de premier recours. Cette Plateforme a pour mission d’analyser les besoins en soins de MPR des différentes régions du canton. Elle étudie entre autres des nouvelles formes d’organisation de l’offre médicale dans le secteur ambulatoire (cabinets de groupes ou projet alternatif tel que maison de santé pluridisciplinaires) avec l’objectif d’émettre des recommandations et des propositions innovantes pour pallier à la pénurie médicale.
Pour trouver des solutions adaptées et assurer la continuité des soins de MPR à la population, les communes sont encouragées à prendre contact avec la Plateforme cantonale de MPR afin d’échanger sur cette problématique et de discuter ouvertement de leurs préoccupations.
Service de la santé publique (SSP)
Informations
Mme Carina Hum, Cheffe de projet, Service de la santé publique: carina.hum@vd.ch
Prof. Thomas Bischoff, Directeur de l’Institut universitaire de médecine générale: thomas.bischoff@hospvd.ch