La communication de données à des partis politiques par les communes vaudoises

Dans la perspective des prochaines élections fédérales qui auront lieu le 22 octobre 2023, de nombreuses communes ont demandé à l’APDI si et, le cas échéant, à quelles conditions des données personnelles de citoyens pouvaient être transmises à des partis politiques. Une telle communication permet aux partis politiques de mener des actions auprès des électeurs en leur adressant des courriers. La présente contribution constitue un rappel des règles applicables en la matière.

Crédit photo : ARC Sieber
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Publié le 11 septembre 2023

La communication de données personnelles par des autorités communales doit être analysée à la lumière de la loi du 11 septembre 2007 sur la protection des données personnelles (LPrD ; BLV 172.65). Selon l’art. 15 al. 1 LPrD, des données personnelles peuvent notamment être communiquées si une base légale le prévoit (let. a), si le requérant établit qu’il en a besoin pour accomplir ses tâches légales (let. b), si le requérant privé justifie d'un intérêt prépondérant à la communication primant celui de la personne concernée à ce que les données ne soient pas communiquées (let. c) ou si la personne concernée a expressément donné son consentement (let. d).

Communication de données personnelles à des partis politiques avant le 1er janvier 2022

Jusqu’au 31 décembre 2021, la communication de données personnelles à des partis politiques trouvait son fondement à l’art. 22 al. 3 de la loi du 9 mai 1983 sur le contrôle des habitants (LCH ; BLV 142.01). Les règles applicables à une telle communication étaient précisées dans la décision du chef du Département de l’économie et du sport datée du 2 février 2017 ainsi que dans la circulaire 17-02 datée du 10 février 2017 du chef du Service de la population.

Concrètement, la Municipalité pouvait décider, sur demande écrite et motivée d’un parti politique, de transmettre sous forme d’étiquettes les nom, prénom, adresse, année de naissance et sexe des habitants de nationalité suisse ou des ressortissants étrangers disposant du droit de vote au niveau communal moyennant le respect d’un certain nombre de conditions. Les données transmises étaient donc issues du registre du contrôle des habitants.

La Municipalité, compétente pour autoriser ou non la communication, disposait alors d’une large marge d’appréciation et pouvait la refuser sans autre justification. 

Cette situation est toutefois révolue.

Communication de données personnelles à des partis politiques depuis le 1er janvier 2022

Depuis le 1er janvier 2022, la transmission de données personnelles à des partis politiques est expressément prévue à l’art. 6 al. 4 de la loi du 5 octobre 2021 sur l’exercice des droits politiques (LEDP ; BLV 160.01) et à l’art. 15 du règlement du 22 décembre 2021 d’application de la loi du 5 octobre 2021 sur l’exercice des droits politiques (RLEDP ; BLV 160.01.1).

Le législateur cantonal a en effet souhaité codifier dans la loi le principe de la transmission aux partis politiques. L’art. 6 al. 4 LEDP dispose que « Sur demande motivée adressée à la municipalité, les partis politiques peuvent obtenir la transmission des données figurant dans le registre du corps électoral ». Le but est notamment de permettre aux partis politiques « de mener des actions de sensibilisation auprès de certaines catégories du corps électoral (p. ex : jeunes électeurs) », comme cela résulte de l’exposé des motifs et projet de loi (EMPL LEDP, janvier 2021 20_LEG_79). Les données transmises sont dès lors issues du registre du corps électoral.

Les modalités d’une telle transmission de données sont précisées à l’art. 15 RLEDP. La transmission ne peut intervenir que si les conditions suivantes sont respectées :

  • Le parti politique demandeur est constitué sous la forme d'une association au sens des articles 60 et suivants du Code civil suisse du 10 décembre 1907 (CC; RS 210) ;
  • La demande doit être adressée à la Municipalité par le biais d'un courrier écrit, motivé et signé par au moins un responsable de l'association à l'origine de la demande ;
  • La demande doit préciser les données demandées et le but poursuivi ;
  • Seuls les noms, les prénoms, le sexe, la date de naissance et l'adresse des personnes inscrites au registre peuvent être communiqués (la transmission devra se limiter aux données demandées) ;
  • L'auteur de la demande doit signer une déclaration par laquelle il s'engage à :
    • ne pas communiquer les données qui lui ont été transmises à des tiers, ni à les utiliser à une autre fin que celle annoncée ;
    • accorder à toute personne faisant l'objet de la transmission, l'accès aux données la concernant et le droit d'en connaître la provenance ;
    • procéder à toute modification ou suppression de données requise par la municipalité ;
    • informer dans les meilleurs délais la Municipalité des demandes d'accès qui lui ont été adressées ;
    • ne pas constituer de base de données à l'aide des données qui lui ont été transmises ;
    • supprimer les données transmises après utilisation ;
  • Les données demandées sont en principe transmises sous la forme d'étiquettes.

De plus, la Municipalité doit vérifier si le but poursuivi par l'auteur de la demande entretient un lien suffisant avec l'exercice des droits politiques. Si tel est le cas, elle est tenue de transmettre les données concernées, moyennant le respect des conditions susmentionnées. En revanche, si le but poursuivi par l’auteur de la demande n’entretient pas de lien suffisant avec l’exercice des droits politiques, la Municipalité est en droit de refuser la transmission. Il va de soi qu’une demande émanant d’un parti politique et n’ayant aucun lien avec l’exercice des droits politiques ne tombe pas sous le coup de ces dispositions.

La Municipalité peut au demeurant percevoir un émolument tenant compte de l'ampleur et de la difficulté du travail fourni (Art. 15 al. 6 RLEDP).

 


Autorité de protection des données et de droit à l'information (APDI)

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