Réaliser l'égalité salariale dans les faits à travers des mesures étatiques

Mise au point avec Maribel Rodriguez, cheffe du Bureau de l’égalité vaudois et présidente de la Commission de contrôle des marchés publics et des subventions.

Madame Rodriguez, pourriez-vous nous présenter les modifications légales en matière d’égalité salariale ainsi que leurs principales implications ?

Les modifications de la loi fédérale sur l’égalité entre femmes et hommes (LEg) vont obliger tous les employeurs qui occupent au moins 100 personnes à procéder à une analyse de l’égalité des salaires. L’analyse devra être vérifiée par un organe indépendant et les résultats communiqués. Par exemple, les employeurs du secteur public devront publier les résultats détaillés de l’analyse ainsi que de la vérification. En cas de non-respect de l’égalité salariale, aucune sanction n’est prévue. L’employeur doit uniquement répéter l’analyse tous les quatre ans et il est libéré de cette obligation dès que les résultats montrent que l’égalité salariale est respectée.

Plusieurs modifications légales adoptées au niveau cantonal en 2018 vont permettre d’introduire des contrôles du respect de l’égalité salariale auprès des entreprises qui ont obtenu des marchés publics dans le canton et auprès des entités subventionnées par l’Etat de Vaud. Dans ce cadre, les entreprises de toute taille pourront être soumises à un contrôle formel mené par des expert.e.s mandaté.e.s par la Commission de contrôle des marchés publics et des subventions (CoMPS). Les entités qui ne respectent pas l’égalité salariale auront 90 jours pour procéder à des mesures correctives et réaliser à leurs frais une nouvelle analyse afin de démontrer leur mise en conformité. À défaut d’exécution, des sanctions sont prévues conformément aux dispositions de la loi sur les marchés publics et de celle sur les subventions.

En quoi les communes du canton seront-elles concernées par ces contrôles de l’égalité salariale ?

Toutes les entreprises participant aux marchés publics dans le Canton de Vaud sont susceptibles d’être contrôlées. Cela signifie qu’une entreprise ayant obtenu une adjudication au niveau communal peut aussi être contrôlée par la CoMPS. Les rapports établis par la Commission de contrôle seront transmis à l’adjudicateur qui peut décider des sanctions à appliquer en cas de non-conformité. Enfin, les communes auront accès à une liste non publique qui leur permettra de savoir si une entreprise a fait l’objet d’un contrôle et, si tel est le cas, quel en a été le résultat.

Quelles sont les principales échéances auxquelles il faut prêter attention ?

La première échéance va concerner les entités qui sont subventionnées par l’Etat de Vaud pour un total d’au moins 5 millions par an. Dès février 2020, ces entités devront apporter la preuve qu’elles respectent l’égalité salariale en joignant à leur demande de subvention les résultats d’un autocontrôle réalisé selon une méthode éprouvée, par exemple l’outil Logib.

Les contrôles dans les marchés publics et les subventions débuteront aussi en février 2020. Ils concerneront chaque année au minimum 10 entreprises adjudicataires de marchés publics ou 10 entités subventionnées. À cet égard, il est important de souligner qu’une certification en égalité salariale, les résultats d’un autocontrôle ou même ceux d’une analyse validée par un organe indépendant dans le cadre de la LEg ne peuvent exempter une entreprise du contrôle mené par la CoMPS.

Au regard des analyses prévues par la LEg, nous avons été informés par le Bureau fédéral de l’égalité que les résultats des analyses ainsi que leur vérification devraient vraisemblablement être livrés dans le courant de l’année 2021.

Comment les communes peuvent-elles vérifier leur pratique salariale sous l’angle de l’égalité entre femmes et hommes ?

La Confédération a mis à disposition un instrument gratuit nommé Logib qui permet de vérifier la pratique salariale des employeurs d’au moins 50 personnes. Cet outil a acquis une solide réputation avec le temps et il constitue l’approche de référence dans le secteur public.

Le Bureau fédéral de l’égalité travaille depuis plusieurs années sur le développement d’un outil d’analyse pour les plus petites structures. Il devrait normalement être disponible début 2020.

En dehors de ces outils, plusieurs entreprises privées ont développé leurs propres méthodes. Il y a cependant peu de transparence sur ces dernières pour le moment et il est difficile de savoir si ces méthodes peuvent être considérées comme scientifiques et conformes au droit au sens de la LEg.

Vers qui peuvent se tourner les communes qui souhaitent analyser leur pratique salariale ?

Pour toute question, elles peuvent contacter Steve Binggeli, chef de projet égalité salariale au Bureau de l’égalité du Canton de Vaud. Monsieur Binggeli est notamment responsable des ateliers de formation au contrôle de l’égalité salariale que nous avons mis en place. Ces ateliers permettent aux employeurs de se familiariser avec l’outil Logib dans la perspective de réaliser leur propre analyse.

Le Bureau fédéral de l’égalité met aussi à disposition une liste des entreprises et organisations garantissant aux employeurs une analyse indépendante et impartiale de l’égalité salariale à l’aide du modèle d’analyse standard de la Confédération.

Que peuvent faire les communes qui souhaitent s’engager sur la thématique de l’égalité salariale ?

Elles peuvent suivre l’exemple du Canton de Vaud et des cinq communes qui ont déjà signé la Charte pour l’égalité salariale dans le secteur public. Cette Charte constitue un engagement qui reflète la volonté des pouvoirs publics d’être exemplaires dans le domaine de l’égalité salariale. Elle permet aussi de créer une communauté dans ce domaine et d’échanger sur les bonnes pratiques, par exemple dans le cadre des rencontres nationales organisées par le Bureau fédéral de l’égalité.

_{Bureau de l’égalité entre les femmes et les hommes (BEFH)}