La chronique des marchés publics : les deux procédures de gré à gré

Cette chronique présente des problématiques rencontrées par les communes ou leurs mandataires dans le cadre de l’application des marchés publics, qui sont régulièrement soumises pour détermination au Centre de compétences sur les marchés publics du canton de Vaud (CCMP-VD). Elle vise à sensibiliser les communes sur certains aspects particuliers des marchés publics, et à leur fournir les outils nécessaires à la résolution de situations parfois complexes.

Photo d'illustration d'archives
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Publié le 22 mars 2013

Nous traiterons dans cette édition de la distinction entre la procédure de gré à gré et la procédure de gré à gré sous conditions.

La procédure de gré à gré

La procédure de gré à gré est définie à l’article 7, alinéa 1, lettre c, de la loi sur les marchés publics (LMP-VD).

Dans cette situation l’adjudicateur adjuge directement un marché sans procéder à un appel d’offres. Cette procédure est applicable pour les marchés dont la valeur se situe en dessous des seuils prévus dans l’annexe de l’Accord intercantonal sur les marchés publics (AIMP), soit:

  • 100’000 francs pour un marché de fournitures;
  • 150’000 francs pour un marché de services;
  • 150’000 francs pour un marché de travaux de second œuvre;
  • 300’000 francs pour un marché de travaux de gros œuvre*.

Dans le cadre de la procédure de gré à gré, l’adjudicateur ne sollicite qu’une seule offre (il n’y a pas d’«appel d’offres») en s’adressant directement au partenaire de son choix, avec lequel il peut entrer en négociation. C’est d’ailleurs là tout l’intérêt de cette procédure puisqu’il s’agit, avec la procédure de gré à gré sous conditions, des deux seules procédures marchés publics dans lesquelles les négociations entre un adjudicateur et un soumissionnaire (un seul à la fois) sont autorisées. Une autre particularité de cette procédure tient à ce que la décision d’adjudication n’est pas soumise à publication.

La procédure de gré à gré donne lieu à de nombreuses applications insolites dans la pratique, applications qui vont le plus souvent à l’encontre de l’esprit de la loi et de la jurisprudence cantonale. Il en va ainsi notamment de la sollicitation simultanée de plusieurs offres (gré à gré multiple), même à des fins de comparaison, et du recours à des rounds de négociation pour offrir à un soumissionnaire local la possibilité de s’aligner sur l’offre concurrente la moins chère, afin d’obtenir le marché. Cette manière de faire constituerait notamment une atteinte au principe de l’égalité de traitement, à la base de la législation sur les marchés publics.

Ainsi donc, si un pouvoir adjudicateur vaudois opte pour une procédure de gré à gré, il ne doit entrer en contact qu’avec un seul partenaire à la fois et ne peut solliciter plusieurs offres en même temps. Que faire alors lorsque l’offre émise par le partenaire en question n’emporte pas l’adhésion du pouvoir adjudicateur? Dans ce cas, l’adjudicateur doit mettre un terme à la relation qu’il a nouée avec son partenaire (de préférence par écrit) avant de pouvoir s’adresser à un autre partenaire de son choix, pour solliciter et obtenir une autre offre qu’il pourra au besoin négocier.

Lorsqu’un pouvoir adjudicateur désire solliciter plusieurs offres en même temps (même à titre comparatif), il doit impérativement suivre une procédure sur invitation (même s’il se situe dans les seuils de la procédure de gré à gré) et se soumettre aux règles particulières de cette procédure, soit notamment:

  1. solliciter au moins trois offres dont une auprès d’une entité extérieure à la commune du lieu d’exécution de la prestation (ce qui évite de favoriser exclusivement les entreprises locales et tend à prévenir la constitution de cartel de soumission);
  2. ne plus entrer en négociations avec les soumissionnaires invités, les négociations étant proscrites dans le cadre de la procédure sur invitation;
  3. annoncer les critères d’adjudication, leur pondération ainsi que les documents à remettre par les soumissionnaires dans la lettre invitant à soumissionner;
  4. indiquer la voie de recours contre la décision d’adjudication aux soumissionnaires non retenus.

* A titre de rappel, les travaux de gros oeuvre sont les travaux qui constituent la structure porteuse d’une construction (CFC 17, 20, 21 et 41), tous les autres types de travaux sont des travaux de second œuvre.

Photo: J.-M. Zellweger Photo: J.-M. Zellweger

La procédure de gré à gré sous conditions

La procédure de gré à gré sous conditions, également nommée procédure de gré à gré extraordinaire, est définie à l’article 8 du règlement d’application de la loi sur les marchés publics (RLMP-VD). Elle s’applique à des marchés soumis à la procédure ouverte (ou sélective), autrement dit à des marchés dont la valeur devrait conduire à l’application d’une procédure ouverte (ou sélective) en vertu des seuils prévus dans l’annexe de l’AIMP mais qui, à certaines conditions légales limitatives, peuvent être exemptés des exigences de la procédure ouverte (ou sélective).

Les conditions nécessaires à l’application de cette procédure sont énumérées à l’article 8 RLMP-VD et interprétées restrictivement par la jurisprudence. Il en va notamment du motif tiré de l’urgence de la situation qui impose que soient réunies les conditions cumulatives suivantes:

  1. la survenance d’un événement objectivement imprévisible qui intervient hors de la sphère d’influence du pouvoir adjudicateur;
  2. l’urgence impérieuse de la prestation commandée (seule la partie vraiment urgente des prestations pourra être adjugée de gré à gré;
  3. un lien de causalité entre l’urgence et la circonstance imprévisible;
  4. la réduction des délais de procédure de l’article 20, alinéa 3, RLMP-VD ne permet pas de résoudre le problème de l’adjudicateur.

Conformément aux articles 39 et 42 RLMP-VD, la publication de la décision d’adjudication qui intervient à la suite d’une procédure de gré à gré sous conditions est obligatoire. Cette publication ouvre une voie de recours contre la décision d’adjudication dans un délai de dix jours.

L’article 39, alinéas 2 et 3, RLMP-VD indique les éléments que doit contenir la publication de l’avis d’adjudication, notamment le prix de l’offre adjudicataire (cf. art. 39, al. 2, let. f, RLMP-VD).

L’élaboration d’un rapport énonçant les motifs qui ont justifié le recours à une procédure de gré à gré sous conditions dans un cas particulier constitue également une exigence imposée par l’article 8, alinéa 3, RLMP-VD.

 


Département des Infrastructures 

En savoir plus

Site internet de l’Etat de Vaud: www.vd.ch/marches-publics

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