Puis-je obtenir la liste d'adresses des habitants de la Commune ?
Les registres tenus par les bureaux de contrôle des habitants (CdH) sont une mine d’or pour tous les organismes privés qui souhaitent obtenir des listes d’adresses exhaustives et fiables. Toutefois, pour chaque demande de transmission de liste d’adresses, le CdH concerné est tenu d’examiner attentivement la requête afin de savoir si les données personnelles demandées peuvent être communiquées.
La réponse ne va pas de soi et peut différer selon le type de demandeur (société locale, entreprise commerciale, parti politique, etc...) et selon la finalité poursuivie (recruter de nouveaux membres, promouvoir une activité, collecter des fonds, organiser un événement festif, etc...).
Le bureau de la Préposée à la protection des données et à l’information (PPDI) est régulièrement sollicité par les CdH vaudois à ce sujet, ce qui lui a permis d’émettre des règles pratiques qui peuvent être reprises dans chaque cas concret.
Base légale
La transmission de données par des autorités communales est réglée à l’article 15 de la loi du 11 septembre 2007 sur la protection des données personnelles (LPrD). La communication de données personnelles, telles que des prénoms, noms et adresses, à des tiers est notamment envisageable lorsqu’une base légale en fait état. Or, la loi du 9 mai 1983 sur le contrôle des habitants (LCH) prévoit ce qui suit pour les privés :
«1 Le bureau de contrôle des habitants est autorisé à renseigner les particuliers sur l'état civil, la date de naissance, l'adresse et l'adresse postale complète, les dates d'arrivée et de départ, le précédent lieu de séjour et la destination d'une personne nommément désignée.
2 La communication systématique de données à des fins commerciales ou publicitaires est interdite.
3 Le département en charge de la population et, sous réserve de dispositions réglementaires, la municipalité peuvent toutefois autoriser la transmission de renseignements à des organismes privés pour permettre la réalisation de travaux d'intérêt général.
4 Les renseignements sont fournis d'après les registres, sans garantie, et leur inexactitude éventuelle n'entraîne aucune responsabilité de la part de l'Etat ou des communes».
La situation est claire quant aux renseignements qui peuvent être fournis à un particulier (al. 1) et quant à l’interdiction de communiquer des données à des fins commerciales ou publicitaires (al. 2). Par exemple, un CdH devra refuser la demande d’une entreprise de téléphonie mobile souhaitant obtenir la liste des adresses des habitants de la commune ayant entre 18 et 25 ans pour leur envoyer des offres d’abonnement destinées aux jeunes. En pratique, les réponses à donner ne sont pas toujours aussi évidentes et sont sujettes à interprétation.
Travail d’intérêt général
Chaque demande de transmission de liste d’adresses déposée par un organisme privé auprès d’un CdH doit être analysée à la lueur de l’article 22 alinéa 3 LCH. La Municipalité peut décider de transmettre des listes à des organismes privés pour permettre la réalisation de travaux d’intérêt général. Il n’est pas aisé de déterminer dans chaque situation si la finalité poursuivie par le demandeur permet la réalisation d’un tel objectif. Ce n’est manifestement pas le cas lorsque l’organisme privé souhaite recruter de nouveaux membres ou collecter des fonds. En revanche, une réponse favorable pourrait être donnée à une école de musique ou à une société de tir locale qui souhaiterait envoyer des documents informatifs ou organiser un événement festif.
En définitive, il est du ressort de la Municipalité de prendre la décision finale pour laquelle elle dispose d’une certaine marge de manœuvre. La PPDI prône de manière générale une certaine retenue dans la transmission de listes. Il faut garder à l’esprit que si la transmission est autorisée, la Municipalité devra accéder à toute demande du même type déposée par des organismes similaires.
Règles de sécurité en cas de transmission
Si la Municipalité avalise la transmission des adresses requises, le destinataire devra être rendu attentif au fait qu’il ne peut utiliser les données concernées que dans le but pour lequel elles ont été communiquées. Un engagement écrit en ce sens devrait être obtenu. Il est souhaitable que le CdH se charge lui-même d’effectuer les envois. Dans la majorité des cas et surtout dans les communes d’une certaine importance, cela s’avérera impossible. Il faudra alors procéder à la transmission sous forme d’étiquettes plutôt que de tableaux en format électronique, trop facilement exploitables à d’autres fins. Enfin, il faut être attentif à ne pas transmettre les données de personnes ayant formulé une demande de confidentialité.
En effet, conformément à l’article 28 LPrD, toute personne a le droit de s’opposer à ce que les données personnelles la concernant soient communiquées si elle rend vraisemblable un intérêt digne de protection. La demande de confidentialité peut être levée, notamment si une disposition légale le prévoit expressément, mais cela ne sera pas le cas dans le cadre d’une demande ponctuelle d’une liste d’adresses déposée par un organisme privé.
Cas particulier : associations et groupements à but politiques
Dans le cadre des prochaines élections fédérales, les CdH ont reçu de nombreuses demandes de transmission de listes d’adresses issues du rôle des électeurs. Or, ce dernier n’est qu’une extraction du registre des habitants de la Commune. A ce titre, les règles exposées précédemment sont applicables mais ont été précisées dans la circulaire adoptée en 2004 par le Conseil d’Etat portant sur l’utilisation de renseignements au profit d’associations et de groupements à but politique.
Si un parti politique dépose une telle demande, la Municipalité concernée est la seule à pouvoir prendre la décision finale. Si cette dernière est positive, les conditions prévues dans la circulaire précitée devront être remplies:
- la demande du parti politique doit être faite par un courrier motivé et signé auprès de la Municipalité ;
- les données personnelles qui peuvent être transmises sont les suivantes : prénom, nom, adresse, année de naissance et sexe. Il convient de respecter le principe de proportionnalité et de ne transmettre que les données effectivement demandées dans chaque cas concret ;
- la Municipalité est également tenue de se prononcer sur le mode de transmission ainsi que sur la perception éventuelle d’émoluments.
Une circulaire reprenant l’ensemble des recommandations mentionnées dans le présent article sera prochainement mise à disposition des CdH. Le bureau de la PPDI répond en outre volontiers aux questions des CdH dans chaque cas concret.
Autorité de protection des données et de droit à l'information (PPDI)
Contact :
Mme Mélanie Buard
Préposée à la protection des données et à l’information
Pl. de la Riponne 5
1002 Lausanne
Tél. 021 316 40 64
melanie.buard@vd.ch